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Un local vélo devient un projet collectif dans une résidence jeunes à Angers

Comment réhabiliter un local vélo pour mieux répondre aux besoins des jeunes résidents et résidentes tout en développant une dynamique collective autour de la pratique cyclable ? À Angers, la résidence Habitat Jeunes Harmattan de l’association Habitat Jeunes David d'Angers (Ahjda) a entièrement repensé son espace vélo avec le soutien du programme Alvéole Plus. Les initiateurs du projet ont profité de cette opportunité pour lancer un projet plus global autour de la mobilité. Rencontre avec Luc Geoffroy, animateur socio-éducatif de l’Ahjda, qui a accompagné les résidents et résidentes dans cette démarche participative.

Publié le 8 septembre 2025
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Dans quel contexte s'est inscrit votre projet de réhabilitation du local vélo ?

Il s'inscrit dans le cadre de l'accompagnement collectif que nous proposons aux résidents et résidentes. Dans les résidences Habitat Jeunes, notre ambition est de proposer plus que du logement. Nous offrons donc un accompagnement individuel et administratif pour les jeunes qui en ont besoin, mais aussi un accompagnement collectif avec des projets qui peuvent se monter à l'initiative des résidents et résidentes.

Lors du conseil de maison (notre équivalent du conseil de vie sociale) de décembre 2023, des résidents et résidentes ont fait part de leur volonté de remettre un coup de neuf au local vélo pour plusieurs raisons. Le premier constat concernait des vélos inutilisés qui ne bougeaient pas pendant des mois, occupant inutilement de l'espace. Ensuite, il y avait des retours sur la qualité des racks à vélo : nous disposions simplement de pince-roues avant fixés au sol, ce qui posait des problèmes de stabilité et pouvait même endommager les roues des vélos. Enfin, le local lui-même, un ancien espace de stockage reconverti rapidement en local vélo, était mal éclairé et peu fonctionnel pour circuler ou entretenir son vélo.

Au fil des discussions, les résidents et résidentes ont aussi exprimé la volonté d'avoir un minimum d'outils pour entretenir ou réparer leurs vélos dans cet espace. Une petite commission de résidents et résidentes s'est alors mise à travailler sur le sujet avec moi et, en faisant des recherches, nous sommes rapidement tombés sur le programme Alvéole Plus qui était parfaitement adapté pour accompagner notre projet.

Comment s'est déroulé le projet ?

Toutes les étapes ont été réalisées avec les résidents et résidentes. Nous avons programmé des rendez-vous réguliers pour qu'ils soient pleinement impliqués. Je rappelais régulièrement aux résidents que, contrairement à eux, je ne vivais pas dans la résidence et que mon rôle se limitait à celui de travailleur social. Il était donc essentiel que le projet soit basé sur leur expérience quotidienne et leurs besoins concrets, plutôt que sur ma vision extérieure.

Initialement, notre projet comprenait l'installation d'un maximum de racks à vélo, d'une station de réparation et de gonflage, et également de casiers pour que les résidents puissent y ranger leurs équipements cyclistes (batteries de vélos électriques, chasubles, etc.). Pour des raisons de budget, nous avons finalement dû renoncer aux casiers, mais nous avons maintenu les racks à vélo et la station de réparation.

Une fois le projet validé, nous avons délibérément choisi de travailler avec des entreprises locales.

Quelles solutions avez-vous finalement retenues ?

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Nous sommes passés de 22 pince-roues à 34 racks à vélo de type "3 points", qui permettent de sécuriser à la fois la roue et le cadre du vélo. Pour optimiser l'espace, ces racks sont disposés en quinconce et à différentes hauteurs : un vélo au sol, puis un vélo plus haut, etc., ce qui nous a permis de gagner en capacité de rangement.

Cette capacité permet désormais d'accueillir les vélos d'environ 30% de nos résidents et résidentes, un ratio qui monte à près de 50% si l'on considère uniquement les résidents et résidentes permanents susceptibles d'utiliser régulièrement un vélo.

Nous avons également installé une station de réparation et de gonflage avec tous les outils nécessaires pour l'entretien des vélos.

Comment avez-vous utilisé les heures de formation proposées par le programme ?

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Nous avons bénéficié de 12 heures de formation à la mobilité à vélo sous forme d'atelier, financées dans le cadre du programme Alvéole Plus. Nous avons fait appel à une association locale, Tous à Vélo Angers, pour animer ces sessions. Parmi ces ateliers, il y avait notamment des sessions pour passer son "code à vélo" et revoir les bases de la circulation à vélo en milieu urbain. Angers étant une métropole bien équipée en infrastructures cyclables, l'idée était de rendre l'activité ludique pour nos résidents et résidentes.

C'était assez amusant de constater à la fin de la soirée "code à vélo" que beaucoup de résidents ne l'auraient pas obtenu ! Nombreux étaient ceux qui avaient des habitudes qui, mises bout à bout, ne respectaient pas vraiment le code de la route, ou ne connaissaient pas la signification de certains panneaux.

Parallèlement, nous avions récupéré des vélos abandonnés dans l'ancien local. Nous avons alors proposé aux résidents et résidentes intéressés de bénéficier gratuitement d'un vélo s'ils s'impliquaient dans le projet et participaient aux ateliers de remise en état. Nous avons conçu un parcours complet qui s'est déroulé sur plusieurs mois, de novembre 2024 à juin 2025 : diagnostic des vélos et identification des réparations nécessaires, commande des pièces, ateliers de mécanique pour remettre les vélos en état, et enfin sorties sur route pour tester les itinéraires domicile-travail.

Tout ce programme a été pensé avec les résidents et résidentes, pas seulement le local vélo mais aussi toutes ses suites, ce qui était particulièrement enrichissant.

Qu'avez-vous constaté suite à la réhabilitation du local ?

Les retours ont été très positifs. Dès l'installation des nouveaux racks et de la station de réparation, les résidents et résidentes nous ont remerciés de les avoir écoutés. Ils ont apprécié que le rangement soit plus facile, la circulation améliorée, et surtout la possibilité de gonfler et d'entretenir leurs vélos directement dans le local, en accès libre et gratuit.

Mais ce qui a été particulièrement intéressant, c'est l'effet "boule de neige" qu'a eu cette rénovation. Le fait de moderniser le local a incité les résidents et résidentes à s'impliquer davantage : nous avons vidé le local pour un grand nettoyage au karche et nous avons installé de nouveaux néons pour améliorer l'éclairage, notamment au niveau de la station de réparation.

Avec presque un an de recul, nous constatons que le projet vit bien. Les vélos sont bien cadenassés, bien rangés, il n'y a pas d'épaves. C'était un bon pari.

Et concernant les ateliers, quel bilan en tirez-vous ?

Le défi était de maintenir l'engagement des résidents dans un projet à moyen ou long terme, en particulier pour celles et ceux qui récupéraient un vélo en mauvais état nécessitant plusieurs réparations. Nous nous demandions s'ils seraient présents du début à la fin. Au final, 16 jeunes ont participé au projet et tous ont obtenu un vélo, ce qui montre que tout le monde s'est impliqué de A à Z.

Nous avons parfois dépassé la capacité maximale de 8 personnes prévue pour les ateliers, car je ne voulais pas refuser des résidents motivés. J'étais donc en appui du programme Alvéole Plus, aux côtés de l'animateur de l’association missionnée. Une belle dynamique d'entraide s'est créée entre les jeunes, ceux qui étaient plus à l'aise avec la mécanique aidant les autres.

Cette démarche nous a également permis de donner une seconde vie à 26 vélos qui auraient autrement été jetés. Certains résidents qui ont depuis quitté la résidence sont même partis avec leur vélo.

En tant que gestionnaire d'habitat social, pourquoi le vélo est-il un enjeu important pour vous ?

Le vélo représente une forme de mobilité économique et accessible pour nos résidents et résidentes, dont beaucoup sont en apprentissage avec des revenus limités. Si certains nous demandent de les accompagner pour passer leur permis de conduire, cela implique un engagement financier important que tous ne peuvent pas assumer.

Quand on présente les réalités aux jeunes, les avantages du vélo sont évidents, surtout dans une métropole comme Angers. Le temps de déplacement à vélo est quasiment le même qu'en voiture, mais c'est beaucoup plus économique et écologique, et bien meilleur pour leur santé. Le vélo offre également une certaine indépendance : contrairement aux transports en commun, on peut partir à l'heure qu'on veut, et contrairement à la voiture, on n'a pas de problème de stationnement.

Un autre atout propre à Angers est l’existence d’un dispositif municipal qui permet d’emprunter gratuitement un vélo pendant un an. C’est une solution qui peut répondre aux besoins de certains de nos résidents et résidentes présents seulement quelques mois ou une année dans le cadre de leurs études, et qui n’auraient pas forcément intérêt à investir dans l’achat d’un vélo.

Avez-vous des projets pour poursuivre cette démarche ?

Notre rôle d'accompagnement en tant que travailleurs sociaux est aussi de sensibiliser aux enjeux sociétaux, de santé et environnementaux liés à l'usage du vélo. Ce projet né à la résidence Harmattan a vocation à s’étendre progressivement aux autres résidences de notre association, qui est engagée dans une démarche de responsabilité sociétale des organisations (RSO). L’objectif est d’offrir des services équivalents à tous nos résidents et résidentes.

Mon collègue de la résidence David d’Angers travaille actuellement sur la rénovation de leur local vélo, en s'inspirant de notre expérience avec le soutien d’Alvéole Plus.

Une nouvelle résidence intergénérationnelle va ouvrir en septembre, et comme toutes les nouvelles constructions, elle intègre déjà des normes avancées pour le stationnement vélo. Dans cette résidence, il y a ainsi quasiment un rack à vélo par habitant, ce qui est idéal. Il n'y a pas encore de station de réparation, mais c'est un projet que nous pourrons développer par la suite.

Le fait d'avoir travaillé avec des partenaires locaux facilite la poursuite de ces partenariats pour de futurs projets dans nos autres résidences.

Quels conseils donneriez-vous à d'autres structures qui souhaitent développer du stationnement ou des projets similaires ?

Le principal conseil, qui peut sembler évident mais qui a été la clé de notre réussite, c'est d'associer les habitants et habitantes au projet et de partir de leurs besoins réels. Je ne vois pas comment un tel projet pourrait échouer dès lors qu'on implique les résidents et résidentes et qu'on leur demande ce qu'ils souhaitent pour leur local vélo.

Pour la résidence David d’Angers, par exemple, la réflexion porte également sur la sécurisation du local. Ils envisagent de passer d'un local en accès libre à un espace sécurisé avec une grille et un système de badge pour limiter les problèmes de vandalisme qu'ils ont rencontrés.

Si je devais évoquer quelques points d'amélioration pour notre projet, je mentionnerais l'accessibilité du local. Le nôtre est bien situé, mais il pourrait être encore mieux placé, plus proche des entrées. Actuellement, il faut parcourir des couloirs d'espaces collectifs pour y accéder, ce qui peut créer des difficultés de circulation. Si c'était à refaire, nous envisagerions peut-être un espace extérieur plutôt qu'intérieur, pour faciliter d'éventuelles extensions futures. Notre local actuel est déjà à sa capacité maximale et ne pourra plus être agrandi.

L'entretien régulier est également crucial. Les vélos ramènent beaucoup de poussière, de terre et de débris, surtout en automne et en hiver. Sans nettoyage régulier, le local peut rapidement devenir sale.

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