La mise en place de stationnements vélos sécurisés ne s'arrête pas à leur installation. Pour garantir leur pérennité et leur bon fonctionnement, une gestion et une maintenance régulières sont essentielles. Retours d'expérience de deux acteurs : Paris Habitat, bailleur social gérant près de 125 000 logements, et la Métropole Rouen Normandie, qui propose 515 places de stationnement réparties sur 39 abris dans le cadre d'un service payant avec abonnement, LOVELO stationnement.
Publié le 12 novembre 2024Crédit photo : ©Métropole de Rouen
La question du stationnement vélo s'est particulièrement imposée ces dernières années. Chez Paris Habitat, un poste dédié aux mobilités actives a été créé en 2021, en réponse aux transformations des pratiques de déplacement observées pendant la période Covid. "On voyait bien que la ville de Paris mettait en place des investissements importants sur les aménagements de voiries et la pratique du vélo", explique Nicolas Levrel, chargé de mission mobilités actives chez Paris Habitat. Le bailleur a alors lancé un “plan vélo”, s'engageant à aménager 1000 places de stationnement par an.
Toutefois, cette nouvelle mission n'est pas sans défi. "Pendant des années, on dépensait zéro euro sur la question du vélo. Notre priorité, c'est le logement", rappelle Nicolas Levrel. "Parfois le vélo passe derrière des dépenses liées à la réparation d'une porte cassée ou des problèmes de fuites d'eau dans les logements."
Crédit photo : Nicolas Levrel pour Paris Habitat
La gestion au quotidien des espaces de stationnement dépend fortement du contexte et de l'organisation de chaque structure. À Paris Habitat, ce sont les gardiens d'immeubles qui assurent le suivi : "Toutes nos résidences ont un gardien, qui est un peu le garant de la bonne tenue de l'immeuble. La gestion quotidienne, c'est la vérification de la propreté des lieux, de la présence ou pas d'épaves ou de vélos abandonnés, ou d'autres objets qui n'ont rien à y faire dans le local vélo", explique Nicolas Levrel.
Du côté de la Métropole de Rouen, la gestion a été déléguée à un exploitant spécialisé : "Notre exploitant intervient à la fois sur le volet clientèle avec un service commercial dédié, et sur la maintenance préventive et curative des abris", précise Elodie Lebrun, chargée de projet mobilités cyclables à la Métropole Rouen Normandie. Un service d'astreinte est disponible 24h/24 et 7j/7 si un usager rencontre des difficultés pour accéder à son stationnement.
Un défi majeur est la gestion optimale de l'espace disponible. À Rouen, les parkings vélos souterrains du centre-ville affichent complet. Pour y remédier, la Métropole travaille avec son exploitant sur le foisonnement : "On essaie d'optimiser nos parkings en étudiant les usages. Certains utilisent le stationnement pour le travail - j'arrive le matin, je reprends mon vélo le soir - d'autres pour du stationnement résidentiel. On pourrait, comme dans les parkings voitures, envisager d’avoir plus d'abonnements que de places physiques", explique Elodie Lebrun.
Paris Habitat fait face à un défi particulier : la présence d'épaves et de vélos abandonnés qui limitent l'espace disponible. Pour y remédier, l'organisme a mis en place une procédure d'enlèvement : information des locataires, délais minimum et affichages. "C'est indispensable quand on veut notamment rénover complètement un local. Pour le rénover, il faut d'abord le vider", souligne Nicolas Levrel. Les vélos non réclamés sont confiés à des associations qui les remettent en circulation après réparation.
L'expérience a conduit les deux structures à faire évoluer leurs équipements. La Métropole de Rouen a ainsi abandonné les racks à deux niveaux initialement installés : "On n'en est vraiment pas satisfait. L'ergonomie est insuffisante - essayez de monter un vélo électrique de 25 kg !" Pour améliorer le service, la collectivité a retiré un rack sur deux, privilégiant désormais les arceaux au sol malgré une réduction de la capacité d'accueil.
Les deux structures ont par ailleurs mis en place différents dispositifs pour sécuriser les accès. À Paris Habitat, "tous nos locaux vélos sont fermés, avec accès par badge ou clé. Dans certains cas, nous ne donnons l'accès qu'aux personnes qui en font la demande, avec tenus d’un registre." La Métropole de Rouen a équipé certains parkings de caméras : "En cas de vol, sur réquisition de la police, nous pouvons fournir les images de vidéosurveillance. Depuis deux ans, nous avons eu trois cas déclarés de vol."
Crédit photo : RéPAR pour Paris Habitat
L'amélioration continue et la relation avec les usagers est au cœur des préoccupations des gestionnaires. "Sur certaines consignes collectives, type “huche à pain”, de première génération, quand l'usager ouvrait l'abri, le vélo prenait une douche. On a pu échanger avec le fournisseur et mettre en place des solutions", explique Elodie Lebrun.
Paris Habitat organise quant à lui des ateliers en pied d'immeuble : "On fait appel à des associations qui viennent et invitent la population à amener son vélo en mauvais état pour apprendre à le réparer. L'effet induit, c'est qu'on a des vélos qui sont en état de rouler dans nos locaux, plutôt que des vélos qui ne roulent plus."!
L'expérience de ces deux structures met en lumière plusieurs éléments essentiels pour assurer une gestion efficace des stationnements vélos. Pour la Métropole de Rouen, la réactivité est primordiale : "Il faut qu'à l'instant T, je puisse réserver ma place, qu'il y ait de la place disponible et que l'abri soit en bon état." Le bailleur parisien insiste quant à lui sur l'importance d'une présence quotidienne sur le terrain et d'une communication claire avec les usagers : "On met en place un panneau qui explique les règles de bon usage destinées aux locataires."
Les deux structures s'accordent également sur la nécessité d'adapter les équipements aux évolutions des pratiques, notamment avec l'essor des vélos cargo. La Métropole de Rouen a ainsi "implanté le premier abri vélo cargo individualisé" sur son territoire, tandis que Paris Habitat veille à intégrer ces nouveaux usages dans ses rénovations.
Cette thématique relativement nouvelle nécessite d'être sans cesse adaptée aux usages. Comme le souligne Elodie Lebrun, "ce service de stationnement payant reste relativement nouveau, nous veillons à rester à l’écoute pour nous améliorer".
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Portés par la FUB, Alvéole Plus et Génération Vélo œuvrent de concert pour la mobilité cyclable. Tandis qu’Alvéole Plus accompagne la création de stationnements abrités et sécurisés, Génération Vélo offre des cofinancements pour déployer le Savoir Rouler à Vélo, un programme d'apprentissage du vélo pour les enfants de 6 à 11 ans. Trois collectivités témoignent de l'impact de ces deux dispositifs sur le développement du vélo sur leur territoire.
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